Résolu 9. Elephant in the room [Daniel x Oden]

[Oden]

La plupart du temps, c'était elle qui répondait. Oden s'était trouvé un nouvel attrait dans les petits cailloux coincés dans l'asphalte. La plupart étaient interrogés en petit groupe, un peu plus nombreux que le leur. Oden avait supposé que c'était pour ne pas se faire déstabiliser, et qu'il était toujours bien plus difficile de garder un secret à deux. Quelque part, ils avaient raison de les interroger de cette manière, c'était plus facile de parler de ça avec quelqu'un qui l'avait vécu qu'avec quelqu'un qui ne pouvait pas s'imaginer une seule seconde du calvaire que ça avait pu être. Il en avait la chair de poule, en y repensant. Plusieurs fois, inconsciemment, Oden plaçait ses mains habituellement fraîche sur sa nuque, à chaque fois l'image de Keith en tête. A aucun moment, son nom n'avait quitté ses lèvres. C'était un secret qu'il avait peur de partager pour l'instant. Tout se mélangeait profondément, et tout ce qu'il avait envie d'entendre, c'était qu'il pouvait rentrer chez lui. En même temps, le ferait-il ? Il voulait attendre Daniel. Il ne l'avait jamais attendu auparavant.

[Daniel]

Au total, je suis resté une heure de plus, peut-être un peu plus. Après la tempête vient la tempête, j'ai eu à faire aux Shadowhunters avec qui c'était déjà plus simple d'interagir parce que je n'avais pas besoin de masquer quoique ce soit. Et puis, la liste des personnes à interroger se retrouve rapidement réduite de moitié, puisque nombreux sont ceux de mon personnel qui sont terrestres. L'interaction avec les Nephilims aura au moins le mérite d'avoir été plus efficace. 

Sans surprise, les terrestres m'ont avertis qu'il allait falloir attendre quelques semaines avant la réouverture du club,le temps de l'enquête. Ce qui accessoirement signifie que je vais devoir envoyer un courrier expliquant à tous les employés, présents comme non présents que malheureusement il faudra attendre avant la réouverture du club. 

La soirée m'a épuisé. Alors une fois qu'il n'y avait plus personne, j'ai décidé de prendre l'air quelques instants, avant de définitivement rentrer chez moi. Tout le monde doit déjà être parti.

[Oden]

Petit à petit, le monticule de personne s'était défait, et chacun était reparti chez soit. Quelques policiers étaient restés, pour s'assurer qu'Oden allait bien dans sa tête, mais avaient fini par perdre patience et avaient préféré partir à leur tour. C'était difficile de tuer le temps avec trois fois rien. Il ne fumait pas, ne ressentait pas le besoin de regarder son portable à tout bout de champ. Il fixait continuellement l'avenue qui s'étendait en face de lui. Les gens allaient et venaient, tous coincés dans leur petite bulle. Personne n'accordait d'importance, pas même un regard, lorsque les forces de l'ordre était arrivé, lorsque le ruban jaune avait été placé. Oden n'osait pas même s'appuyer sur le mur de la boite de nuit dans son dos. Quelque part, c'était rassurant de voir autant de vie dehors, autant de personne qui allait bien et qui ne se doutaient de rien.

On ouvrit finalement la porte à côté de lui. Oden avait attendu longtemps, il ne savait pas réellement combien de temps, simplement pour tomber sur lui.

" - Hey, hey, Daniel."

Encore une fois, Oden parlait tout bas. Le propre son de sa voix ne voulait pas éveiller l'attention des autres à côté, même s'il n'y avait personne. Puis, ce n'était pas le moment de crier, il y avait eu suffisamment de brouhaha pour ce soir, ou ce matin.

" - Désolé, je t'attendais."

[Daniel] 

J'ai manqué de sursauter en entendant mon nom être prononcé, aussi fin qu'un murmure, là où j'étais persuadé d'être enfin seul avec moi-même. En me tournant vers le son, Oden, qui donnait l'impression de vouloir disparaître de la surface de la terre. Pas simple quand on fait la taille d'un géant.

“-Qu'est-ce que tu fais là ?”

 Oden étant toujours là, cela signifie que je ne peux pas m'écrouler sous la fatigue, pas encore. Pourtant l'ensemble de cette soirée m'empêchait de dissimuler correctement tout ce qu'à un autre moment j'aurais caché sans soucis. Notamment ma surprise pour ce cas-là. Il m'attendait ? Ça veut dire qu'il est au moins resté une heure de plus depuis l'accident. Mon Dieu, quelle heure était-il ? 

Je venais me mettre à côté de lui, extériorisant toute ma fatigue dans un soupir fin, discret. Personne ne m'attends jamais, et surtout moi je n'attends jamais personne. On est pas sur la même planète à l'origine, alors à quoi bon attendre après les gens ? Oden est un drôle de personnage. 

“-Ça s'est bien passé ?”

[Oden]

" - Hm... Je ne suis pas réellement sûr que l'on puisse dire ça..."

Bien passé, pas bien passé... C'était arrivé, et c'était déjà grave finalement. Seul, il avait souvent voulu que tout redevienne comme avant, comme un mauvais rêve, et qu'il n'y aura rien de caché dans une petite pièce miteuse du Pandémonium.

" - Je voulais..."

C'était devenu si difficile de parle rà Daniel, maintenant. C'était comme s'ils venaient effectivement de deux mondes opposés. Oden avait craqué sous la pression, et Daniel restait de marbre, c'était juste une mauvaise journée, voilà tout. Peut-être qu'il lui faisait perdre son temps. Oden n'était pas du genre à abandonner, ceci dit.

" - Je voulais passer encore un peu de temps avec toi. Sans parler de ce qui s'est passé, en tout cas."

Oden ne l'avait pas planifié, c'était juste un grand sentiment de vide et de solitude qui s'était emparé de lui après tout ce chaos. Daniel s'était montré comme une sorte d'ami, pour le moins relativement précieux jusque là, quand on oubliait la hiérarchie à laquelle ils étaient sujets tous les deux. Le Suédois n'était pas aussi prompt à appeler d'autres coups d'un soir des amis comme il pourrait l'oser avec Daniel.

[Daniel]

Oui, voilà. Ça restait ni plus ni moins qu'un mauvais moment à passer. Il ne ressortait rien de bon des meurtres comme celui-là, et pourtant ça restait une forme de nature comme une autre. La nature aussi parfaite soit-elle n'en reste pas moins cruelle. 

Mais il n'y avait pas que ça, sa cruauté. 

J'ai légèrement penché la tête sur le côté, la confession d'Oden ne me laissant pas de marbre. C'était drôle de se dire qu'il y avait quelque chose qui ramenait constamment Oden vers moi, et presque inversement même. En revanche je ne pense pas être la meilleure des compagnie. Mais soit, je pouvais faire ça Je pense me surestimer, ma fatigue ne me mènera pas autre part que chez moi ce soir. C'était fatiguant, à la longue.

Je regardais Oden sous toutes les coutures, c'était plus simple de deviner ce qui pouvait lui passer par la tête comme ça.

“-Je vais te ramener chez toi.”

[Oden]

La proposition de Daniel n'était pas ce qu'Oden souhaitait, mais c'était mieux que rien pour l'instant. Il n'était pas sûr de pouvoir dormir après ce qui venait de se passer. Il ne savait pas même comment ingérer toutes les informations qui lui était parvenu jusque là. Oden pouvait toujours profiter de la compagnie de Daniel encore un petit moment.

" - Ca me va, si t'as rien d'autre à faire."

Il ne saurait pas dire s'il était trop tard, ou trop tôt. Le soleil commençait à se lever, laissant dans le ciel une traînée poudreuse de mauve, d'orange, et un bleu nouveau. C'était autant de couleurs qui ne se reflétaient jamais sur Oden, toujours sur les autres. Il replaça correctement son sac sur les épaules, avant de commencer à marcher, la capuche sur la tête, donnant quelques coups d'oeil vers Daniel pour savoir s'il le suivait ou non.

[Daniel]

“-Que penses-tu que je puisse avoir d'autres à faire, hm ?”

Dans les jours à venir, ma vie n'allait pas être  bien différente de celle d'un terrestre lambda. Pour maintenir les apparences, il fallait qu'à mon tour  je sois sur le banc de touche. Sans oublier que rien ne me dit que le Pandemonium ne souffrira pas de la crise d'un point de vue économique. Alors oui, je risque de ne pas avoir un planning rempli avant un moment.

 Sur le chemin Oden comme moi essayons de nous mêler à la foule, chose compliqué au possible. Aucun de nous deux avons le physique classique qui nous aurait bien aidé dans une situation différente, au moins l'heure matinale évitait les regards trop insistants sur nous. Les gens étaient trop fatigués pour faire attention à quique ce soit, en même temps faire abstraction du monde devenait d'une facilité inquiétante. 

“-Tu vas avoir plusieurs jours de congés, profites-en pour te reposer.” murmurais-je 

Ce n'était ni le lieu, ni le moment pour pour élever la voix inutilement.  Je n'avais pas la force de gaspiller mon énergie inutilement non plus, et pour finir je m'insultais intérieurement pour ce que j'essayais de faire. Je sais pertinemment ce que je suis en train de faire, et c'est ridicule. Mais okay, peut-être que oui, une partie de moi voulait réconforter Oden.

[Oden]

Même si Oden était moins à risque, à la vu de tous, c'était toujours plus réconfortant d'avoir Daniel à ses côtés. Voir Oden sans sourire, c'était voir Mickey sans ses oreilles, c'était très étrange et quelque chose que le garçon détestait par dessus tout. Alors il se raccrochait à ce qu'il pouvait, et en ce moment, c'était la personne qui l'accompagnait. Il glissait ses mains dans ses poches, tirant presque sur son pull pour observer autour de lui sans être gêné par sa capuche.

" - J'y compte bien. Tu devrais faire pareil. Les gens ont tendance à négliger leur sommeil."

Ce n'était pas un luxe qu'Oden pouvait se permettre. Un jour passé sans ses au moins huit heures de sommeil apportait de légères irrégularités dans sa poitrine, qui causait des respirations toutes aussi saccadées. Oden se fatiguait beaucoup plus rapidement.

[Daniel]

Oden ne souriait pas, pas ce soir. Il n'y avait rien qui justifiait un sourire, c'est plutôt le contraire. Au fond une partie de moi était rassuré qu'il n'aille pas jusqu'à mettre sa carapace impassible dans une situation comme celle-ci, autrement j'aurais dû admettre qu'il était meilleur acteur que moi, à tous les niveaux. Même moi je ne pouvais pas prétendre une apathie aussi radicale que celle de penser que les sourires rendent la vie meilleure en toute circonstance.

J'attrapais ma lèvre inférieure à sa remarque. Arf, me reposer. Moi ? 

“-Je ne te promets rien.”

Les Créatures Obscures sont plus actives de jours que de nuit, c'est un fait que personne ne peut contester. C'est pour ça que l'emploi du temps du Pandemonium m'allait à ravir, en réalité j'ai plus d'énergie à revendre à ce moment-là. Normalement. Là, dans l'immédiat, je me sentais juste lessivé dans tous les sens du terme.