12. Rivers in the Desert [Daniel x Oden]

[Daniel]

Est-ce que les choses ont changés entre Daniel et Oden depuis la dernière fois ? Pour tout le monde, leur relation est resté aussi mystérieuse qu'elle ne l'était depuis le début, à savoir que Daniel appréciait Oden plus que la plupart des gens, et qu'Oden de son côté semble s'être porté garant pour s'occuper de la table du grand patron. En réalité, leur relation était autant mystérieuse pour eux deux que pour le reste du monde, assez pour que ça les effraie. À rester trop longtemps sur leur petit nuage fictif, la chute risque de coûter énormément, à l'un comme à l'autre. Cela ne les empêchait pas de continuer ceci dit, puisque leur solitude respective primait sur le reste de leurs doute. Peu importe leur relation, ça ne regardait qu'eux à la fin.

Le vie a donc fini par reprendre son cours. Daniel n'avait pas mentionné les événements récents avec Oden par manque de temps et par crainte. Les choses ont changées, certes, mais ce n'était pas la peine de ramener le sujet sur la table. Daniel devait peut-être essayer de lâcher un peu de leste, de laisser le temps à la relation se créer, et ce peu importe sa nature. C'est pour ça qu'il ne souhaitait pas penser à Oden de façon trop excessive. Ils ont une vie à part, et quelques fois l'un se retrouvait sur le chemin de l'autre, avant de retourner sur le sien. C'est aussi simple que ça. 

[Oden]

Oden ne saurait dire s'il avait changé en bien, ou en mal ces derniers jours. Il avait cette manière candide de faire, de vouloir s'améliorer, et en même temps de rester en retrait ou d'agir de manière plus maladroite que d'habitude. De l'extérieur, il aurait paru comme la grande perche normale qui ne sait pas quoi faire de ses mains et de ses jambes. Pour ceux qui le connaissaient, il semblait toujours ailleurs, jamais vraiment présent. Mais toujours aussi souriant.

Il était resté planté là, deux secondes devant la porte d'entrée. Il regardait son reflet dans la vitre, prit une grande inspiration et recoiffait ses cheveux correctement. D'abord plaqué, en arrière, lui donnant un air un peu plus soigné et adulte. L'image lui plaisait. Il ouvrit la porte et rentra à l'intérieur, se retourna un instant pour observer son reflet, et décida de passer sa main dans ses cheveux pour les décoiffer. Certaines habitudes ont la peau dure.

Une fois à l'intérieur, Oden salua ses collègues d'un geste de la main, cheminant jusqu'aux vestiaires pour mettre sa tenue. L'albinos était toujours dans la lune. Enfin, Oden rejoignit l'entrée avec les autres. Les autres, et Daniel, qu'il cherchait des yeux. Premier réflexe: lever les yeux vers le haut, et chercher les longs cheveux liquides de Daniel.

[Daniel]

Puisqu'Oden n'avait par encore débuté son service, Daniel était descendu lui-même au bar. Oh, oui, Daniel est bel et bien descendu de son piédestal, de ce petit perchoir depuis lequel il peut tout observer. Est-ce qu'il allait vers les autres pour autant ? Pas plus qu'il n'aurait habituellement, mais il était descendu dans cette foule qui ne lui appartenait pas plus que lorsqu'il se situait à l'étage du dessus. Il se démarquait bien physiquement du reste, mais c'était un fait qui de naissance : il n'appartenait par à leur monde.

Le temps qu'on lui serve son cocktail favori, la Fée pensait, ou bien essayait. Il était difficile de réfléchir correctement avec l'alcool, la musique, la danse et la magie du moment, et Daniel avait beau être maître d'un tel lieu, il n'était pas toujours friand du bruit qui accompagnait incontestablement son night-club. Il ne se sentait jamais perdu, du moins il ne l'admettra jamais de voix vive, mais lorsque le gérant était dans une réflexion profonde que maintenant, il aimerait faire disparaitre le bruit pour pouvoir mieux réfléchir de son côté. Ironiquement, il était plus sensible au bruit que la grande majorité des terrestres autour de lui.

"- Et voilà pour vous, Monsieur."

Le barman tendait la commande de Daniel dans sa direction, un sourire charmeur aux lèvres, chose auquel le garçon resta insensible, articulant un simple merci alors qu'il entamait une première gorgée rapide.

"- Faites monter des Old Fashioned à ma table. Une dizaine." 

Le barman hocha la tête, avant de repartir dans son coin. Eh oui, ses "groupies" comme Oden aime les appeler, étaient revenues. Il fallait qu'il remette sa casquette de patron un peu playboy. Pourtant il ne remontait pas encore, voulant repousser l'échéance de quelques minutes supplémentaires.

[Oden]

Oden garda pour lui-même sa petite déception de ne pas voir Daniel en hauteur. Il était peut-être caché, en retrait, plus loin à l'étage là où Oden - ni personne d'autre - ne pouvait le voir. Il haussa les épaules, comme pour se convaincre que ce n'était rien. De toute façon il était sûr de l'apercevoir, hors cas exceptionnel. Oden connaissait ses horaires par coeur, à force. Il ne lui fallu pas quelques pas en avant pour se rendre compte que la silhouette au bar en face de lui était l'homme qu'il recherchait. Son sourire s'agrandit, comme s'il avait un trouvé un motif pour afficher une telle tête heureuse. Oui, Daniel. Et c'était suffisant. Inconsciemment, Oden recoiffait ses cheveux comme il l'avait fait devant la porte, se redonnant ce même air un peu plus adulte, contrastant avec son air enjoué.

S'approchant du bar, Oden était assez proche pour les entendre parler. Il haussait un sourcil, les mains dans les poches. A quoi cela lui sert d'appeler des filles ce soir ? Le Suédois prit sa place derrière le bar, qu'il ne risquait pas de quitter avant la fin de la soirée. Ca ne l'empêchait pas de côtoyer Daniel vu qu'il était là. Comme à son habitude, Oden s'abaissait sur le comptoir, les mains nouées ensembles.

" - Hey hey, tu me remplaces maintenant ? Ton verre d'alcool, tes groupies... Tu ne veux plus me voir ?"

Son sourire trahissait le fond de sa pensée. Oden cherchait à l'embêter, il n'en pensait pas plus. Encore heureux que Daniel puisse compter sur d'autres employés pour être servi dans son bar lorsqu'Oden n'était pas là, et bonne chance pour se défaire de ses petites chéries.

[Daniel]

Si le message de Daniel est passé, il n'avait plus rien à faire par ici, combien même ces derniers temps il ne se sentait pas d'humeur à traîner avec ses petites fans, qui elles ne traînaient avec lui que par intérêt. Ce n'est pas grave, Daniel lui-même se sert des gens par intérêt. Ce qui l'a arrêté dans sa course pour remonter en haut était une voix qui lui est familière, unique en son genre de par son accent qui ne s'efface jamais entièrement. En l'entendant, Daniel s'était mis à sourire malgré lui, soulagé de savoir qu'Oden était présent ce soir. Mais ça, c'est un secret qu'il se garderait bien de dire à qui que ce soit. 

Lorsqu'il s'est tourné face à Oden, Daniel était redevenu celui qu'on connaissait de lui : cette personne solennelle et digne. Enfin, il était peut-être encore un peu différent avec Oden. D'où que ce petit sourire n'était pas effacé, amusé par la remarque de l'albinos. Quelle drôle de façon de dire bonjour.

"- Comme si. Mais tu n'étais pas encore là."

[Oden]

Daniel allait s'en aller, et retourner en haut. Oden jetait quelques petits coups d'oeil derrière lui et sur le perchoir, observant les gens qui allaient et venaient, ceux qui dansaient. Ce qu'il adorait regarder par-dessus tout était les bracelets qui s'illuminaient après avoir été cassé. Il reposait rapidement ses yeux sur Daniel, jouant avec ses pouces.

" - C'est un reproche ?"

Oden pencha la tête d'un côté, une mine faussement déçue, malgré son ineffaçable sourire.

" - Tu aurais pu m'attendre, tu savais que je viendrais."

En public, leur relation n'avait pas réellement changée. Leur action n'étaient pas forcées, au contraire, elles lui paraissaient bien plus naturelles. Puis, il faut dire que leur petit engagement avait quelque chose de bon. Oden ne batifolait plus réellement de gauche à droite, et ne se risquait plus avec n'importe quel inconnu. Daniel avait quelque chose de bien.

" - Je vois tes groupies qui montent, tu ferais mieux de les rejoindre avant qu'elles ne viennent envahir mon bar."

Daniel]

Loin de là, la remarque de Daniel n’était pas faite pour offenser Oden le moins du monde, mais le prénommé n’avait pas l’air blessé par les propos de Daniel. Tant mieux, ce n’était pas son intention. Ils se contentaient de jouer, et c’était très bien comme ça aussi.

« - Ah, tu te fais désirer ? »

Ça ne dérangeait pas Daniel de jouer à ce jeu entre Oden et lui, lorsqu’il est certain que personne ne fait attention à lui. Ces moments ne sont pas aussi rares qu’on puisse le penser. Au départ, les gens sont attirés par Daniel pour son air exotique, cette allure unique de par sa caractéristique de fée. Quand ils comprennent qu’il n’a rien de spécial, ils se désintéressent aussi rapidement qu’ils se sont intéressés à lui. Alors ceux qui connaissent Daniel de vue ne font pas attention à lui. Oden ne s’était pas encore désintéressé de lui, Dieu sait par quel miracle cela a été possible.

« - Si je ne te connaissais pas, je dirais que tu essaies de te débarrasser de moi. » 

[Oden]

Fleureter n'était pas inconnu pour Oden. Savoir se rendre accessible, ne pas tout dévoiler, paraître naturel et être soi-même... Mais jamais cela ne lui était venu à l'esprit de vouloir se faire désirer des autres. Son physique faisait pratiquement tout le travail, Oden se contentait de le vendre et de le mettre en avant, voilà tout. Il pencha la tête d'un côté, soudainement intéressé.

" - Pourquoi pas ?"

Oden pouvait bien rentrer dans cet espèce de jeu entre eux. Il ne possédait pas Daniel, mais ils étaient bien plus proches que la plupart des "amis" ordinaires, et il pouvait compter sur le fait qu'il revenait toujours à son appartement à un moment où à un autre. Il savait que Daniel avait continué à lui parler et s'intéresser à lui seulement pour des cheveux blancs, et tant qu'il gardait son apparence spéciale, il garderait Daniel. Le reste importait peu. La personnalité ne joue aucun rôle, l'argent, le pouvoir, peu lui importe. Oden ne couchait pas avec son patron dans l'espoir d'obtenir une promotion, de toute manière. Il était bien mieux derrière un bar que dans un bureau derrière, caché de tous, et seuls.

" - Oh tu peux rester là si ça te chante."

Oden se redressa du bar, remontant les manches de sa chemises en observant les jeunes filles au-dessus d'eux, qui lui renvoyait son regard.

" - Mais toi, tu n'as pas envie d'aller les voir ?"

[Daniel]

La Fée pouffa légèrement face à l'honnêteté du terrestre, qui était vivement encouragé. Daniel appréciait toujours l'honnêteté chez une tierce personne, il la mettait en haute estime. Venant d'Oden, c'était un petit plus car Daniel se disait que, peut-être il pourrait lui accorder plus de confiance qu'à d'autres jusque là. Il fallait l'admettre, Oden est quelqu'un d'attachant de base. 

Daniel pouvait faire ce qu'il voulait ici, si l'envie lui prenait. Disons qu'ici, il avait les pleins pouvoirs et il n'en abusera jamais. Mais ce n'était certainement pas ici qu'on pouvait restreindre la fée. Rester ici à discuter avec Oden n'était pas un si mauvais horizon. 

Oui, mais c'est là que ça coince. Le bruit en haut incita l'homme à relever les yeux à l'étage supérieur. Son groupe, bien évidemment, qu'on ne qualifierait pas de discret. Des rires féminins pour la plupart, et pour l'oreille fine de Daniel même quelques interpellations de son prénom. Tous étaient là par intérêt, c'est juste une question de relations. Les bonnes relations peuvent nous propulser au sommet, du moins c'est ce que pense Daniel. 

"- Pas vraiment, non."

Si Oden se risquait à être un peu plus honnête, Daniel en ferait de même. Il respectait aussi le simple principe du "donnant-donnant", d'autant plus dans l'étrange relation que les deux hommes ont. Il porta son verre à ses lèvres, les yeux relevés vers son groupe.

[Oden]

Daniel et Oden avaient leurs yeux rivés vers le groupe de femme en haut, qui appelaient Daniel de toutes les manières possibles. Ca ne faisait qu'encourager Oden à se tenir loin du genre féminin, qui lui fait plus peur qu'il ne l'attire. Il rabaissa les yeux sur Daniel, en réfléchissant.

Daniel n'avait pas envie de les voir, oui mais pourquoi ? Ca ne peut pas être le bruit, parce que sinon Daniel se serait déjà montré réticent auparavant, ce qui n'était pas le cas. La fée était arrogante, appréciait le regard et l'admiration, il avait besoin d'elles et elles avaient besoin de lui. C'était superficiel, mais Oden n'allait certainement pas s'improviser donneur de leçon. De toute façon, Daniel pouvait bien voir ce qui lui chante, cela ne le dérangeait pas. Alors qu'est-ce qui dérangeait Daniel ?

" - Pourquoi ?"

Avec un ton un peu plus espiègle, Oden se mit à chuchoter.

" - Je peux te renverser une bouteille dessus, on doit avoir de la vodka diluée, t'ira te changer et elles partiront après s'être lassée. Dans le pires des cas, tu devras te déshabiller avec elles."