Résolu 11. Showdown [Daniel x Oden]

[Daniel]

Lorsqu'il s'est mis à reprendre cet air sérieux, ces questions tout à fait sincère, j'ai décidé de me reculer un peu, récupérant mon smoothie entre mes mains. 

"- Oui, bien sûr." 

Évidemment que ça me protège. En se faisant passer pour ce qu'on n'est pas, on n'expose personne à notre véritable nature. C'est la spécialité des fées, contrôler ce qui doit être perçu, et non la réalité des choses tels qu'elles sont. Quelqu'un qui connait le véritable nom d'une fée possède sa vulnérabilité, c'est pour ça qu'il faut toujours s'envelopper d'une carapace d'à priori, ne pas trop se dévoiler à ceux qui n'en valent pas la peine. 

"- C'est plus simple comme ça. Je déciderai de me dévoiler à qui me plaira." 

Quelque part il est plus simple d'avoir cette image de garçon joueur plutôt que de laisser les autres me voir pour que je suis. Je ne le dirais pas à Oden, mais peut-être que oui, ça aussi ça m'effrayait un petit peu. Mes deux parents sont fous amoureux l'un de l'autre, le genre de relations que n'importe qui souhaiterait avoir. Dans les relations physiques que je choisis d'avoir, il y a cet espèce d'espoir de trouver une symbiose entre moi et l'autre personne. Des fois ça arrivait, mais jamais ça ne me paraissait suffisant. Ce n'est pas ça, l'étincelle que je cherche.

[Oden]

C'était un sujet plus sensible qu'Oden l'aurait cru, pour Daniel du moins. Il le laissait reculer, sans chercher à empiéter son espace. Il finissait rapidement son smoothie, avant de le poser dans un coin de la table.

" - Mais est-ce que ça te plait ?"

Dans le cas d'Oden, ça lui plaisait, tout lui plaisait. Être libre, voir des gens, les voir dans l'intimité de son appartement ou les leur, aussi, bien entendu. Sa joie de vivre était tout autant importante. Sans ça, Oden pouvait se laisser aller dans un lit d'hôpital en attendant, à tout jamais. Ce n'était pas ça, vivre. Il ne savait pas si c'était la même pour Daniel, s'il appréciait ce qu'il faisait, ou s'il le devait parce qu'il a cette image à garder.

" - Est-ce que ça te fait regretter d'avoir couché avec moi ?"

[Daniel] 

"- Ça me plaît." 

Mon mode de vie ne me déplaît pas, loin de là. D'un point de vue purement physique, j'aimais bien plaire aux gens, et j'aimais savoir aussi que je plais. Comme beaucoup, je pouvais apprécier l'intimité d'un moment et toutes les sensations qui peuvent y être liés. Alors même si ça fait partie de mon image de patron playboy que d'entretenir cette pensée, je ne détestais pas entièrement. Loin de là, même.

La question d'Oden a suscité d'autant plus mon attention qu'il s'agissait d'une expérience qu'on a partagé ensemble. Étrangement, je me penchais de nouveau vers lui - en gardant une distance raisonnable, pour qu'il comprenne ce que je vais dire.

"- Il n'y a rien qu'on me forcera à faire si je ne veux pas le faire." 

Alors non, je ne regrette pas d'avoir couché avec lui. Ça ne m'a même pas traversé l'esprit.

[Oden]

Ce n'était pas rare, d'avoir une conversation sérieuse avec Oden. Mais généralement, le garçon n'était pas du genre à se laisser aller dans des divagations aussi graves et importantes. Tout dépendait du moment, de la personne aussi. Il esquissa un petit sourire, beaucoup plus doux, peut-être plus discret, mais il était sincère, Oden était touché.

Il ne savait même pas quoi répondre à ça. Il n'était pas comme Daniel, c'était facile de tirer sur ses manches et de le traîner un peu partout sans qu'on ait besoin de demander son accord. C'était probablement pour ça que Daniel en était là où il était dans la vie: il méritait sa place, son caractère avait quelque chose d'admirable.

[Daniel]

Ce n'est pas tant que je suis quelqu'un de prude - ahaha, comme si -, qu'en réalité je n'évoque que rarement les ébats que j'ai eu avec  les autres. De un, parce qu'en général je ne me lie pas plus que le nécessaire à mes coups d'un soir, ce qui n'ouvre aucune fenêtre pour discuter de notre moment d'intimité. Ensuite c'est assez rare que je réitère deux fois l'expérience avec la même personne. Le fait que je propose à Oden de remettre le couvercle à l'occasion est en soit un miracle. Je... J'ai aimé sa façon de faire, ça changeait de d'habitude, on va dire.

[Oden]

Daniel ne parlait plus non plus. Parfois, le silence valait mille mot, même si Oden n'aimait pas trop ça. Il avait l'impression que les gens mettaient soudainement de la distance entre eux et lui. Mais c'était aussi quelque de précieux. Il l'observait du coin de l'oeil, discrètement. Il avait considéré Daniel comme acquis, en quelque sorte. Bien sûr qu'il appréciait sortir avec lui, tout comme ce soir, mais il mentirait s'il ne se sentait pas suffisamment confortable avec Daniel pour pouvoir parler de tout et de rien avec lui, et lui avoir proposé de voyager avec lui. Oui, le considérait comme acquis, ils pouvaient avoir des différents, se dire pardon, et recommencer à se parler comme avant. Du moins il l'espérait. En quelques sortes, ils avaient effectivement quitté le cadre professionnel normalement instauré par la société. Et puis, plus il le regardait, plus il trouvait Daniel adorable. C'était une pensée qu'il avait déjà eu la dernière fois. Il joue les grands, les durs, le garçon pas facile d'accès qui laisse sa porte ouverte à tous malgré tout, alors qu'en réalité il était beaucoup plus tendre et vulnérable.

" - Et toi ? Tu penses à quoi ?"

[Daniel]

 Je faisais tanguer le liquide de mon smoothie de droite à gauche pour ressentir la froideur se baladait dans ce même sens. En parallèle Oden n'échappa pas à mon regard. La question est moins drôle posée dans l'autre sens que lorsque c'est moi qui la pose. Je pouvais jouer plusieurs cartes, dont une que j'ai déjà utilisé. Elle consisterait à laisser à Oden libre imagination de ce qu'il peut bien se passer dans ma tête, comme tout à l'heure. Ou là encore, je peux récompenser son honnêteté de tout à l'heure et répondre honnêtement.

"- À toi." 

Il méritait bien ça, et puis c'est vague comme comme réponse, mais il n'en a pas demandé plus ceci dit. 

[Oden]

A lui ? Ses lèvres se sont fendues en un sourire si large qu'il préférait le cacher derrière ses mains, posant son menton contre ses paumes, ses coudes sur la table. Il préférait regarder ailleurs, s'il se mettait à croiser le regard de Daniel, cela le ferait sourire encore plus, signe qu'il avait été profondément touché.

" - C'est vrai ? Et tu penses à quoi de moi ? Tu me vois comment ?"

Après tout, lui ne s'était pas gêné pour poser des questions. C'était beaucoup trop agréable lorsque les gens pensent à vous. Est-ce que Daniel flirtait ? Beaucoup trop de questions qui lui embrumaient l'esprit, maintenant qu'il était confus.

(Daniel qui flirte sans flirter)

[Daniel]

Était-ce si étonnant que je pense à lui, qui est assis en face de moi ? Avec un sourire qui serait capable de redonner la vue à un aveugle, qui-plus-est. Malgré le détournement de ses yeux, mon regard à moi restait bien en place pour pouvoir déceler la moindre pensée d'Oden si elle venait à se traduire dans des petits tiques par rapport à sa gestuelle.

"- Je sais pas pourquoi, mais je te traite différemment." 

Différemment des autres, je veux dire. Et c'est bien avant l'histoire avec le Monde Obscur. Je ne suis pas certain que ça ait entièrement à voir avec le fait qu'on ait couché ensemble non plus. On prenant le temps de faire attention à moi, allez, une peu plus d'une heure, il n'est pas compliqué de comprendre que la plupart des choses que je peux être amené à faire avec Oden, je ne m'embêterais pas à les faire avec tout le monde. Après, certes, il y a pleins de points sur lesquels je mets Oden à même échelle que les reste, en revanche c'est les détails plus discrets qui font toute la différence. Bien sûr que je l'ai remarqué.

[Oden]

Ca, il le prenait comme un énorme compliment de la part de Daniel. Mais il était si surprenant, qu'Oden perdait son sourire et venait questionner Daniel du regard. Qu'est-ce qu'il voulait dire, par "différemment" ? Pour ce qui était de ses collègues, bien sûr, mais parce qu'ils n'étaient tout simplement pas aussi proche. Oden n'était pas désespéré au point de croire que Daniel n'avait pas d'autres connaissances tout aussi proches, voire plus. Il y avait ce docteur, qui l'avait examiné, Bellamy ? Quelque chose comme ça. Mis à part ce type, Oden n'avait aucun moyen de comparer.

" - Ca me fait extrêmement plaisir, en tout cas."